dimanche 26 novembre 2006

Appel aux Militants et Sympathisants de l'UPC

Appel aux militants et sympathisants de l’UPC


Camarades de l’UPC, c’est Charly Gabriel Mbock qui a le privilège de s’adresser à vous, je vous envoie mon salut fraternel. Vous savez qu’il y a largement plus qualifié que moi pour s’adresser à chacune et à chacun d’entre vous. Le présent appel vient d’un camarade militant de base, respectueux de sa hiérarchie, qui exprime cependant le vif espoir de voir concrétiser l’option d’unité prise par les militants et sympathisants de notre parti. Je m’associe profondément au souci de redonner sa place, sa splendeur, et un destin de dignité à l’âme immortelle du peuple camerounais. A cet effet, il est important que chacun de nous se recycle ; une fois ce recyclage fait et notre foi confirmée, leur consolidation et leur mise en application ne seront plus, sans doute, qu’une question de méthode. Chacun a cependant pu se rendre compte que les divergences de méthodes peuvent diviser des parents politiques qui, pourtant, ont fait le mêmes choix, pris les mêmes risques, et parfois payer le même prix. Chacun a aussi pu constater que des disputes de procédure et de préséance peuvent obscurcir des objectifs que les Pères du nationalisme camerounais ont clairement définis et défendus avec courage jusqu’au sacrifice suprême. Chacun aura enfin eu le temps de découvrir que ceux qui vivent de querelles statutaires risquent de sacrifier la vie et le destin d’un mouvement historique à un juridisme statique dont seuls nos adversaires tirent des dividendes politiques. Il n’est pourtant guère dans notre idée, chers camarades, il n’est pas du tout dans notre idée de banaliser les textes et le respect qui leur est dû. Les textes constituent les fondements de toute organisation, mais toute organisation, pour vivre et rester vivante, doit capitaliser son passé, surtout lorsque ce passé est de gloire patriotique comme le passé de l’UPC ; ladite organisation doit surtout s’adapter à son temps pour répondre aux interpellations présentent et à venir, toujours exigeantes d’innovation et de créativité.


Heureusement ! Heureusement qu’au Cameroun nul mieux que les militants et sympathisants de l’UPC ne sait ce qu’est la mémoire combattante d’un peuple. Vous portez des blessures mal pansées, donc mal guéries, et jamais cicatrisées. Des tombes, pour ceux des martyrs qui ont pu en avoir une, des tombes nous rappellent au quotidien que des précurseurs ont œuvré à l’avènement d’un Cameroun de liberté et d’oxygène, où le Droit et la dignité du peuple ne soient pas de simples faits de discours électoralistes. Mais voici qu’en lieu et place de ce destin d’oxygène, on nous a imposé une démocratie lacrymogène. Vous n’avez pas estimé urgent d’oublier et vous avez bien raison. Celui qui ne se rappelle rien, n’appelle rien ; car tout déficit de passé génère un déficit d’avenir. Le capital de mémoire de l’UPC mérite donc d’être valoriser au mieux de la production de cet avenir pour lequel bien des femmes et bien des hommes ont sacrifié, qui sa jeunesse, qui son métier, qui sa carrière, ses amis ou sa famille, et la plupart leur vie. Nous ne pouvons prétendre honorer le sacrifice de ceux qui nous ont précédé si nous n’offrons à leur mémoire qu’une couronne de chicanes. Abel Kingué, Ernest Ouandié, Osendé Afana, Félix Moumié, Ruben Um Nyobé et j’en oublie, aucun ne reviendra plus jamais nous disputer une place dans les organigrammes de cette république à laquelle ils ont donné naissance. Pensons nous qu’ils puissent reposer en paix, comme on dit, quand il voit éparpillé un héritage qu’ils ont patiemment organisé au prix de leur vie ? Ils n’ont certes pas toujours été du même avis en tous points, l’unanisme n’est pas upéciste, mais leurs divergences de méthode n’ont jamais, mais alors jamais constitué une menace pour l’idéal collectif. Les balises valaient pour tous et devaient conduire à un objectif consensuel.


Que dire donc lorsque nous trompant de combat, et partant, d’adversaires, nous dépensons encore plus d’intelligence à entraver la marche de l’UPC qu’à restaurer sa place de mouvement fondateur de la Nation
camerounaise. Car plutôt que de partager ou de céder un rôle, certains n’ont pas hésité à livrer l’UPC à ceux-là même dont la vocation depuis des décennies est de persécuter l’UPC. L’adversaire a tiré grand avantage de nos démangeaisons internes, il les a même monté en épingle avec pour but de faire croire que les disputes internes sont la caractéristique de l’UPC, mais vous ne vous êtes pas laisser prendre.


L’organisation administrative au pouvoir présente une façade de sérénité du fait qu’elle est précisément administrative et non politique ; l’on y avance par cooptation, non par élection, ni évaluation technique. C’est à la suite d’une cooptation qu’on y devient ce qu’ils appellent « personnalité politique » ; alors on coud l’habit de bal l’après-midi même de la cooptation avant de savoir sur quelle musique on devra se trémousser le soir. Le ressort de telles organisations c’est l’appât du gain personnel. Et la peur de perdre une position gastronomique oblige les uns à se taire, les autres à feindre la cécité et la surdité, vous pensez certainement à ce trio de singes dont la devise est de ne rien voir, de ne rien entendre, et surtout de ne rien dire ! En effet, dans de telles organisations administratives on singe la politique, et ce qu’il faut bien nommer la part du singe prime sur les options humanistes dont vie la politique, telle du moins que l’entendaient nos Pères nationalistes. Ne nous y trompons donc plus, ceux qui ont investi le pouvoir administratif à titre personnel se déchirent encore plus férocement que ceux qui tentent d’accélérer l’avènement d’un pouvoir politique au Cameroun. Alors que ces derniers se battent pour s’entendre sur ce qu’il faut apporter au peuple camerounais, eux se déchirent par mésentente sur ce qu’ils ont arraché à ce peuple. Leur solidarité est de rapine, et face à une nation qu’ils ont déchu en butin ils ne sont pas unis en vérité, ils se tiennent comme il est d’usage dans toute association douteuse. Voilà pourquoi aucun d’eux n’est fier de l’aisance matérielle qu’il affiche, voilà pourquoi aucun d’eux ne semble pressé de déclarer des biens manifestement mal acquis. Les militants de l’UPC ne sauraient donc se laisser impressionner par leur simulacre d’unité ou les uns et les autres n’affichent qu’une sérénité de caméra.


De la base, car j’ai le privilège d’être militant de base, j’estime que l’avenir de l’UPC reste devant nous. La mémoire de notre histoire peut fonder l’avenir de notre victoire, à condition que l’énergie intellectuelle et physique des nôtres soit consacrée à la restauration du destin d’un mouvement qui, à lui seul, résume l’histoire politique du Cameroun. Certaines organisations à prétentions politiques ont donné le change en changeant de nom, d’autres n’ont vu le jour et n’ont relativement prospéré que pour avoir vêtu le manteau nationaliste de l’UPC, mais les baptêmes successifs de l’organisation administrative au pouvoir n’ont pu faire oublié qu’il s’agit toujours de l’Esocam, organisation artificielle que l’administration coloniale a crée de toutes pièces dans le but explicite de contrecarrer l’action de l’UPC. Quant aux patriotes saisonniers, leur nationalisme de costume n’aura duré que le temps de programmer la sécession et la partition de ce Cameroun même dont l’unification fut le cheval de bataille des Pères nationalistes. L’expérience que nous avons du paysage politique camerounais nous fonde à affirmer que si l’UPC n’innerve pas la vie politique nationale il y aura peu de chance qu’il existe une vie politique honorable au Cameroun. Il faut donc le préciser : Ce n’est pas l’UPC qui est dans l’opposition, c’est à l’UPC que les autres, que tous les autres, s’opposent. Ce sont les autres qui depuis toujours s’opposent au programme historique de l’UPC, les uns après l’avoir parasité suite à l’assassinat de ses promoteurs, bien d’autres pour l’avoir singé. En fait de vie politique, l’on est fondé à relever qu’au Cameroun le pouvoir administratif s’est obstinément substitué au pouvoir politique. Une organisation administrative détient le pouvoir de décision depuis 1958 ! Cette machine administrative s’est constamment et farouchement armée contre une vie politique véritable au Cameroun. Elle sait cependant que la politique est du côté de l’UPC, dont le programme est resté d’actualité un demi siècle durant, malgré les campagnes de persécutions et les manœuvres d’éradication. Il n’est donc pas indifférent que malgré ces pertes en ressources humaines et ces lourdes mutilations l’UPC ait célébré ces noces d’or avec le Cameroun. Quand des populations aussi férocement et aussi constamment violentées s’approprient à ce point un idéal, quand des militants molestés et mutilés assument leur vocation en l’absence du leader, alors la vie politique à des chances de commencer car la politique vit de symboles et de représentations. Les adeptes de l’UPC ont montré, en plus de 50 ans d’adversité, qu’ils n’avaient pas besoin de la présence physique de leurs leaders pour rester fidèle à leur message de liberté et de dignité. Il est aujourd’hui peu de dirigeants de nos formations partisanes et circonstancielles qui en aient l’étoffe. Cela veut dire, chers camarades, que seuls les Pères nationalistes de l’UPC ont pu accéder au statut de leader politique du fait de leur puissance de symboles et de leur incontestable représentativité politique. Un tel constat assigne des devoirs.


Le premier consiste, pour chaque upéciste, a se ressaisir pour situer son engagement politique personnel au niveau même où les leaders avaient su le hisser. Par calcul, certains adversaires ont cru pouvoir réduire l’UPC à une tribu et à une seule tribu du Cameroun. Cela arrangerait bien leur affaire qu’il en soit ainsi, mais la facilité ne semble pas avoir été le choix des Pères nationalistes. Et puisqu’il semble nécessaire de le redire, soulignons à ce propos que si Abel Kingué était un Bassa de Dschang et Ernest Ouandié un Bassa de Bafoussam, alors Félix Moumié était un Bassa de Foumban, et Ruben Um Nyobé, née Bassa de Songpeck, doit avoir été à la fois Boulou, Bamiléké, Bamoun, Moundang, Ewondo, Eton, j’en passe, lui qui a su, au-delà des ethnies, conquérir les intelligences et les cœurs de tant de filles et de tant de fils du Cameroun pour cette lutte patriotique nationale dans laquelle lui et ses compagnons ont lassé leur vie. Ceux qui produisent du brouillard autour de l’UPC pourraient à la rigueur prétendre ne pas savoir pour qui, ni pour quoi, ils tiennent à brouiller les cartes politiques du Cameroun, mais ils savent pertinemment contre quoi ils sont à l’œuvre. Heureusement, l’UPC compte suffisamment d’intelligences pour gérer ses incompréhensions et ces brouilles circonstancielles. Ils suffiraient, pour les uns et les autres, de s’oublier un peu, et c’est notre second devoir, inspiré du choix de désintéressement, que les Pères nationalistes ont fait. Nous n’aurions pas d’efforts surhumains à déployer pour tenter de les imiter. Aujourd’hui, nous nous hâtons de bâtir des immeubles, de garnir des comptes en banque, mais voilà des jeunes gens qui ont été fauchés à la fleur de l’âge, ils n’ont pas eu le temps de construire seulement leur propre maison, occupés qu’ils étaient à construire la nation. Aucun d’eux n’a laissé de comptes codés dans aucune banque, mais plutôt que d’amasser de l’argent à compter, leur ambition était de compter parmi ceux sur qui le peuple camerounais pouvait compter. Même une sépulture décente dans leur propre pays aura été refusée à la plupart d’entre eux. Mais depuis qu’ils ont été arraché à notre affection, c’est dans nos cœurs qu’ils reposent, et si l’on en croit ce penseur : « le meilleur rempart d’une nation est la poitrine de ses enfants ». Il en va sans doute des patriotes comme des patries qu’ils ont su défendre, c’est dans le cœur de leur peuple qu’ils trouvent leur mausolée.


Quelles autres leçons pouvons-nous en tirer ? Ces martyrs ne se sont pas engagés en politique pour avoir une chemise propre, une case en matériaux définitifs ou une voiture puissante ; on s’engage en politique quand on a quelque chose à donner aux populations et non quand on vise quelque chose à prendre aux populations. Et le meilleur don à faire à son peuple c’est son temps, son énergie, sa créativité, et sa vie quand il le faut. Les Pères nationalistes l’enseignent, toute raison de vivre est une raison de mourir. Et la Bible
nous confirme qu’il n’est pas de meilleure preuve d’amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. Nous retrouver ensemble pour célébrer ce don de la vie pour un Cameroun différent me semble aujourd’hui le plus petit commun effort qu’on puisse attendre de tous ceux qui se réclament des Pères nationalistes. Ils ont pu s’oublier, c’est sans doute pour cela qu’ils seront à jamais inoubliables. Je ne crois pas que nous soyons incapables d’honorer leur sacrifice, bien au contraire. L’UPC a fait ses preuves en bien des épreuves, les unes aussi difficiles que les autres. L’épreuve de la division est liée à des incompréhensions conjoncturelles, non à des choix politiques structurels. En effet, la vocation originelle de l’UPC est restée fondamentalement la même depuis plus d’un siècle, ce n’est pas le moindre titre de gloire de l’UPC.


Pour ma part, camarades, je frappe humblement à ta porte, car la cloche du grand ralliement à sonner. Je ne suis pas important, moi, mais il y a des choses importantes à faire, et c’est ce qui me mobilise vers vous. Le moment est venu de donner enfin une chance à l’UPC. Nos adversaires administratifs savent que cela revient de donner enfin une opportunité politique à toutes les populations du Cameroun, parce qu’ils savent, pour avoir entendu Mpodol le dire dans le maquis le 28 décembre 1955, car Mpodol le disait : « sans l’UPC notre peuple serait resté dans la complète ignorance de son statut et par cela même de son avenir. Sans l’UPC le problème kamerunais n’aurais jamais été soulevé devant les Nations Unies. Sans l’UPC le peuple kamerunais n’aurait jamais acquis la maturité politique qui lui permet de lutter efficacement aujourd’hui pour l’unité et l’indépendance immédiate de son pays. », voici ce que Mpodol disait en 55. Et l’un des plus farouches persécuteurs de l’UPC a dû le reconnaître en juillet de la même année 55 lorsqu’il déclarait que « l’élimination de l’UPC crée un vide politique au Cameroun », je vous parle de Roland Pré. Ce vide organisé et entretenu depuis 50 ans semble aujourd’hui en passe d’être comblé. L’heure que vivent les militants de l’UPC nous rappelle le message que Ruben Um Nyobé, Félix Roland Moumié, Abel Kingué et Ernest Ouandié ont conjointement signé et publié le 3 octobre 1955 à la veille d’une mission des Nations Unies au Cameroun, et que disait-il ? Il disait : « L’heure du choix, l’heure de la prise de responsabilité est venue. Il faut choisir. Le plus coupable c’est celui qui ne veut pas choisir, car se faisant il favorise le mauvais choix, qui condamnerait le peuple kamerunais à un esclavage éternel. On peut s’abstenir pour un choix ordinaire, mais les abstentions en la circonstance actuelle équivaudraient à une trahison. Il faut choisir… ». C’est donc vous dire, chers camarades, que l’avenir de l’UPC est entre les mains des filles et des fils du Cameroun, de toutes les filles et de tous les fils du Cameroun. Et pour tout vous dire, la renaissance même du Cameroun, sa renaissance politique, passe par la renaissance de l’UPC.


Voilà en quoi la dynamique unitaire que vous avez décidé de concrétiser est un processus éminemment patriotique. Elle ne concerne pas les seuls militants et sympathisants de l’UPC, cette dynamique sollicite tous les Camerounais par ses retombées positives sur l’ensemble de la vie nationale. Nul ne devrait d’ailleurs s’en étonner, avec l’UPC il s’agit toujours de l’ensemble des populations du Cameroun, sans exclusive ! Que ne ferions-nous, camarades, si ensemble le décidions vraiment ?

Que le Seigneur inspire nos pensées et nos actions.

Charly Gabriel Mbock

A propos du MOST

Trois questions á Charly Gabriel Mbock

Entretien mene par Awa Ba
(Diffusé le 1er Juillet 1999)

Dr. Charly Gabriel Mbock, anthropologue camerounais en service au ministere de la recherche scientifique et technique, et vice president du Comité intergouvernemental du Management Of Social Transformation (Most) pour la Région Afrique, nous parle de ce premier programme en sciences sociales mis sur pied par l’unesco en 1994-1995 et de l’avenir des sciences sociales dans le continent.

Q: Quels sont les objectifs du Most ?

R: Le Most est un programme de l’Unesco pour la recherche en sciences sociales. Son bureau est composé d’un président et de six vice-présidents issus de toutes les regions du monde.Dans la région Afrique, le Most se fixe comme objectif l’étude des questions relatives au multi-culturalisme, au pluralisme ethnique, l’étude des questions urbaines en relation avec la survie des populations et l’étude des rapports entre le global et le local. C’est un espace d’échanges d’informations scientifiques qui veut établir des liens entre les chercheurs et les décideurs pour la mise á la disposition de ces derniers de résultats de la recherche susceptibles de faciliter leur prise de décision. Notre ambition est d’organiser des projets sous-régionaux et régionaux qui, par une approche inter et trans-disciplinaire prend en charge des priorités de recherche pour nos pays respectifs. Cinquante deux (52) comités nationaux de liaison qui forment la région Afrique sont ainsi concernés. Une demi-douzaine de projets sont actuellement en cours.

Q: Quel bilan peut-on tirer de votre participation á la Conférence mondiale sur la science ?

R: Elle a été une formidable occasion pour rencontrer tous les collégues africains et de faire des contacts intéressants parce que nous envisageons la création d’un Réseau régional de recherche en sciences sociales. En outre, pour la premiére fois, les sciences sociales sont largement évoquées au cours d’une conférence mondiale de l’Unesco. Quoi qu’il faille admettre que ce n’est que le début d’un processus, puisqu’au départ la Conférence était seulement réservée aux sciences naturelles et exactes. A l’issue des débats, il est clairement apparu que toute recherche pose le probléme de l’Homme et de son environnement ; meme la nature est devenue une question sociale et les sciences dites naturelles ne peuvent plus faire l’économie des sciences dites sociales. A terme, c’est par la société que s’explique et se justifie la nature.

Q: Comment voyez-vous l’avenir des sciences sociales, en Afrique plus particuliérement?

R: Les recherches en sciences sociales constituent une question vitale en Afrique. Depuis les indépendances, il apparaît que les pouvoirs n'ont pas toujours rencontré les priorités des sociétés africaines si bien que le pouvoir politique soit encore incapable de se transformer en pouvoir social.

Nous avons des États et nous révons de bâtir des nations mais, il se trouve que nous n'avons pas encore bâti des sociétés parce que les pouvoirs n'ont pas toujours pris en compte les résultats des travaux des sciences sociales pour résoudre les problémes sociaux. Le défi africain est de bâtir, d’abord, des sociétés viables. Pour y arriver, il est indispensable de s’appuyer sur les analyses scientifiques qui, dans leur démarche, identifient les problémes, font une classification pour déterminer les priorités. Et, en fonction de ces derniéres, des actions peuvent étre envisagées.

Gouvernance: Pousser l'UPC au maquis


Gouvernance: Pousser l'UPC au maquis

Le gouvernement du Cameroun confirme sa nouvelle ambition de gouvernance : il ne lui a pas suffi de faire son marché dans le réfrigérateur de l’UPC. Les divisions provoquées n’ayant pas réussi à éradiquer l’UPC de la mémoire nationale, le gouvernement recourt à une méthode qui date de 1955 : pousser l’UPC au maquis ! L’histoire va donc sans doute se répéter. Or quand l’histoire se répète, disait Marx, c’est toujours comme une farce.

Il ne s’agit pas de hurler au complot comme ceux-là dont les casseroles managériales déclenchent un tintamarre de plus en plus assourdissant. Nous voudrions simplement faire l’opinion témoin des manoeuvres que le gouvernement inspire, entreprend ou entretient opiniâtrement pour que l’Union des Populations du Cameroun soit non seulement émasculée mais, une fois encore, exclue de la scène politique nationale. Et l’UPC le sera puisque bientôt, ses couleurs seront arborées par des « ralliés », figurants choisis et entretenus par un pouvoir dont la raison d’être, depuis les années 50, est l’éradication de l’UPC !

Quelques faits pertinents le démontrent.

Fait N°1 : Le gouvernement se dérobe derrière l'OAPI

Par lettre n° 000682/L/MINATD/DAP/CES du 09 Mars 2004, le Ministre d’Etat chargé de l’Administration territoriale et de la décentralisation, qui signe Marafa Hamidou Yaya, a ordonné aux autorités administratives du Cameroun «de n’autoriser à l’avenir que les seules demandes de réunions et manifestations publiques initiées par monsieur Augustin Frédéric Kodock pour le compte de l’UPC ».

Il aurait été saisi « par le Ministre d’Etat chargé de l’Agriculture et Secrétaire Général de l’UPC au sujet des déclarations de monsieur Hogbe Nlénd, relatives à l’organisation à Yaoundé le 10 avril 2004 dans le cadre de la célébration du 56è anniversaire de l’UPC, d’un forum dénommé « Forum pur le développement du Cameroun au 21è siècle, dans la réconciliation nationale, la paix et la sécurité ». A ses yeux, « le conflit de leadership qui existait au sein de ce parti politique (…) vient d’être réglé par l’arrêté 03/1491/0API/DG/DPG/SSD/HYK du 10 novembre 2003 du Directeur Général de l’Organisation Africaine de la Propriété Intellectuelle (AOPI), portant protection des sigles et insignes de l’UPC et reconnaissant monsieur Augustin Frédéric Kodock et maître Nouga comme seuls mandataires de cette formation politique ».

Cette correspondance d’Etat est riche de quelques surprises.

Nous apprenons en effet, du Ministre d’Etat chargé de l’Administration territoriale en personne, que contrairement à la loi N° 90/055 du 19 décembre 1990 portant régime des réunions et des manifestations publiques, il ne suffit plus que lesdites réunions et manifestations publiques soient « déclarées » : il faut désormais qu’elles soient « autorisées » quand il s’agit de l’UPC… Mais cette formation politique ne sera sans doute pas la seule concernée, puisque le gouvernement révèle enfin l’esprit de sa loi sur les réunions et manifestations publiques. Ceux qui croyaient que la gouvernance à la camerounaise avait progressé du régime répressif d’autorisation au régime libéral de déclaration se feront librement une opinion sur l’excellence de ce progrès en matière de libertés publiques.

Nous apprenons ensuite qu’au Cameroun, le gouvernement est prompt à transformer des « Associations » par nature collectives, en « propriétés », quand ça l’arrange. Les corsaires politiques qui n’auraient eu aucune ressource intellectuelle ni morale pour créer l’UPC s’accrochent à leur concubinage avec le gouvernement pour en obtenir que l’UPC, créée en 1948 comme Mouvement politique et reconnue comme tel par les lois actuelles, soit réduite à une propriété intellectuelle individuelle !

Passe encore qu’un individu protège les sigles et insignes d’une association au nom des membres qui s’y reconnaissent et s’en réclament : mais qu’une association soit ainsi réduite à la propriété exclusive d’un individu à la représentativité somme toute douteuse confirme, sans conteste, que la patrimonialisation est le ressort de la gouvernance à la camerounaise : le gouvernement s’étant voulu propriétaire de l’Etat et du Cameroun ne peut qu’encourager la patrimonialisation des formations politiques – ainsi réduites aux individus, au détriment des projets de société.

Pourtant, au moment où le MINATD instruisait la Préfectorale nationale, il était en possession de documents judiciaires dont une simple exploitation lui aurait évité d’indigner l’opinion nationale et d’embarrasser l’opinion internationale !

Fait n°2 Le gouvernement bafoue l'autorité de la chose jugée

Le 06 Mai 2002, M. Augustin Frédéric Kodock a porté plainte à M. Henri Hogbe Nlénd pour " s'entendre ordonner la suspension de toutes les résolutions du Congrès de l'UPC tenu au Palais des Congrès de Yaoundé les 13 et 14 Avril 2002", et "annuler purement et simplement les résolutions et décisions prises".

Pour justifier son acte, l'intéressé s'est prévalu de la qualité de seul et unique Secrétaire Général de l'UPC. Le Tribunal, par ordonnance N° 713/C du 10 Mai 2002, retenant:

« - que outre l'intérêt et la capacité, la condition pour être admis à ester en justice est la qualité

- que Augustin Frédéric Kodock ne justifie pas de la sienne,

a statué publiquement, contradictoirement à l'égard de toutes les parties, en matière de référé et en premier ressort a déclaré l'action d'Augustin Frédéric Kodock "irrecevable", l'a renvoyé à mieux se pourvoir, a mis les dépens à sa charge ».

Le 22 avril 2003, par lettres N° 070 / SG/UPC, et 071/SG/UPC, le nouveau Secrétaire Général de l’UPC, Henri Hogbe Nlénd, a saisi les autorités de la république des deux décisions de justice relatives au « conflit de légitimité » à la Direction de l’UPC :

Ø L’Ordonnance de Référé N° 713/C qui précède, et que M. Le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé a rendue le 10 mai 2002. Il n’est pas inutile de rappeler que c’est pour défaut de qualité que l’ancien Secrétaire Général, M. Kodock, a perdu le procès qu’il a intenté à la nouvelle Direction de l’UPC.

Ø L’expédition de l’Ordonnance de Référé administratif N° 30/OR/PCA/CS/200162002 rendue le 15 mai 2002 par la Chambre Administrative de la Cour Suprême. Cette Ordonnance déclare « recevable » l’intervention du nouveau Secrétaire Général de l’UPC pour faire matérialiser par la Cour Suprême l’expiration depuis plus de dix ans du mandat statutaire et légal de la Direction de l’UPC issue du Congrès de Nkongsamba en 1991 et dont se réclamait encore l’ancien Secrétaire Général .

De nombreux cas de déni de justice ont été déplorés et dénoncés au Cameroun. Le mépris des décisions de la Justice ayant rangé le Cameroun dans les Etats de non droit, la communauté internationale a fait de l’assainissement du pouvoir judiciaire l’un des critères de bonne gouvernance et même d’atteinte du point d’achèvement. Il n’y a donc aucune joie à constater qu’en 2004, le gouvernement du Cameroun peut asséner au monde la preuve que la malgouvernance décriée n’était pas une calomnie, mais une tare promue en culture managériale.

L’on observe en effet que c’est au lendemain des décisions de la Justice susmentionnées qu’un individu s’est précipité à l’OAPI pour en obtenir un enregistrement sous le N°48424 du 10 Novembre 2003. Cette rage d’appropriation a même fait oublier que dix ans plus tôt, le 19 juin 1993 déjà, la même OAPI avait enregistré et protégé le même sigle « Union des Populations du Cameroun » sous le N° 32156, avec notification de cette protection aux personnes dûment mandatées à cet effet par l’UPC, conformément aux dispositions pertinentes de l’article 21 de son Règlement Intérieur. La grande différence entre les deux enregistrements c’est que la première protège un patrimoine réputé collectif, tandis que la seconde en fait une propriété individuelle ! L’un des deux certificats doit certainement être de trop, sans doute un faux.

Comment dès lors ne pas s’étonner qu’une Organisation de la propriété dite intellectuelle délivre aussi intelligemment le même certificat sur la même « propriété » à différents requérants, sans s’interroger ? Manque de professionnalisme dans le classement des registres ou simple intelligence avec des imposteurs? Suffira-t-il désormais de complicité gouvernementale pour qu’une association, entreprise ou organisation, se voit spoliée de son patrimoine par ceux dont l’objectif mal maquillé consiste à brader ledit patrimoine ? Le gouvernement peut-il, en toute responsabilité, abdiquer ses obligations régaliennes et céder la gestion administrative et sociale des partis politiques à l’OAPI en excipant « du respect des conventions internationales auxquelles notre pays a adhéré » ?

Ce sera bien la première convention internationale que le gouvernement aura trouvé urgent de respecter. Et nous dirions : « Oui, sans doute, et pourquoi pas ? ». Pourvu cependant qu’il soit établi que l’objet à enregistrer et à protéger par l’OAPI est effectivement l’invention, la création, la production intellectuelle de celui qui en revendique la propriété exclusive. En dehors de cela, il y a piraterie. En l’occurrence, même les adversaires les plus acharnés de l’UPC sont indignés d’apprendre qu’il se trouve, au Cameroun, des individus capables de s’imaginer qu’ils pourraient, sur la base de quelques complicités circonstancielles, s’arroger subrepticement la propriété d’un tel patrimoine politique national et historique…Le seul fait d’avoir entrepris une démarche aussi inqualifiable révèle cependant la petite nature des épiciers politiques qui monnayent l’UPC.

Dans ces conditions,il n’est ni excessif, ni désobligeant d’affirmer qu’au Cameroun la corruption politique est d’instigation gouvernementale : M. Marafa Hamidou Yaya est demeuré bruyamment silencieux quand son homme à perdu son procès contre l’UPC ; mais il a su retrouver l’usage de la parole quand il s’est agi de soutenir l’imposture commise auprès de l’OAPI. Et cette caution gouvernementale de l’imposture s’est officiellement déployée dans une véhémente interdiction prononcée à l’encontre de l’UPC.

Nous aurions voulu croire possible que le Ministre d’Etat chargé de l’Administration territoriale ait été induit en erreur. Mais les chiens d’un même village savent comment court chacun d’eux. La question est trop sensible pour que la légèreté explique ce choix, il s’agit d’un choix délibéré dans lequel chacun reconnaît la méthode que l’UPC a tragiquement expérimentée dans les années 50 !

Comment comprendre une récidive de cette violence quand on a entendu Paul Biya déclarer à Bamenda (1985) qu’au Cameroun, il ne sera « plus nécessaire d’entrer dans le maquis pour exprimer ses opinions » ?

C’est précisément parce qu’un nouveau bannissement de l’UPC a été minutieusement programmé qu’on peut comprendre pourquoi certains abus d’autorité dûment signalés ont été, sans exception, couverts par le Ministre d’Etat chargé de l’Administration territoriale. Ces différents abus seraient passés inaperçus si, par la correspondance incriminée, M. Marafa Hamidou Yaya n’avait tenu à parachever personnellement sa besogne.

Des abus d'autorité prémonitoires

Le 10 septembre 2003 le Sous-préfet de Mvengue s’est permis d’humilier publiquement M. Messi Messi François à Mengande : M. messi a eu le tort d’être militant de l’UPC en plein Sud ! Le « Chef de terre » a donc publiquement fait brûler son T-Shirt frappé aux insignes de l’Union des populations du Cameroun et l’a forcé à rester à genoux devant femme et enfants, dans la cour du village ! La lettre conjointe N° 154/ AN/CAB/CGM du 13 janvier 2004 adressée à cet effet par deux Députés UPC au Ministre d’Etat Chargé de l’Administration territoriale est demeurée sans suite.

Préoccupés par des indices troublants, notamment des lettres d’intimidation qu’un Ministre d’Etat venait d’adresser aux autorités administratives de Nyong et Kellé, deux Députés UPC ont saisi le MINATD de la lettre N° 250/ AN/CAB/CGM du 17 juin 2005 à effet de le sensibiliser aux entraves administratives que certains Elus UPC rencontreraient dans leur circonscription électorale quant au libre fonctionnement de l’Union des Populations du Cameroun. Sans suite.

Le 12 Août 2005, le Sous-préfet de Bôtmakak a, de ses propres mains, violemment détruit une banderole frappée aux insignes et aux couleurs de l’UPC. Il espérait ainsi provoquer la colère des populations et saboter une cérémonie de remise de dons par un Député. Une lettre conjointe N° 257/AN/CAB/CGM du 13 Août 2005 adressée par ce Député au MINATD est demeurée, elle aussi, sans suite.

Par lettre confidentielle N° 273/AN/CAB/CGM du 06 mars 2006, deux députés UPC ont saisi le Bureau de l’Assemblée nationale pour être rétablis dans leur droit de proposer des candidats aux fonctions administratives qui sont concédées à leur parti. Quoique majoritaires, ses deux députés sur les trois qui arborent les couleurs de l’UPC ont été mis en minorité, au seul bénéfice de celui qui est en concubinage dans la majorité présidentielle…Cette injustice est d’autant plus frappante que les subventions d’Etat aux partis politiques sont, à égalité, réparties entre les deux factions représentées au Parlement, sur la base d’un accord formel signé entre les deux « Secrétaires Généraux » en conflit à l’UPC. Mais cette distorsion du principe d’équité confirme simplement que c’est de fort curieuse manière que notre gouvernance respecte le principe de la majorité quand il s’agit de l’UPC !

Le même arbitraire prévaut dans la gestion de l’espace médiatique consenti par l’Etat du Cameroun aux partis politiques représentés à l’Assemblée : le gouvernement a, aveuglément mais de manière très intéressée, rangé l’UPC dans la majorité présidentielle. Seulement, deux députés sur les trois ne se reconnaissent pas dans cette concussion. Plutôt que de souscrire à une promiscuité politique propre à brouiller la visibilité de leur formation politique, ils se sont réservés d’intervenir sur ce plateau de la CRTV. C’est pourquoi l’espace médiatique qui devait revenir à l’UPC est, depuis bientôt cinq ans, infesté par des hérauts de la mendicité dont la logorrhée masque mal l’indigence intellectuelle et politique.

Pour avoir déjà dépouillé les décisions de justice de l’autorité de la chose jugée, le gouvernement pouvait désormais se permettre de porter ce qu’il croit être l’estocade à l’UPC, en lui interdisant des activités publiques dont il réserve l’exclusivité à ceux qui chantent les cantiques du pouvoir, et qui se prévalent de cette collusion pour négocier leur impunité. C’est de cette manière qu’insidieusement, le bannissement de l’UPC est redevenu une réalité à l’ordre du jour : le pouvoir en déficit de compétitivité entend dorénavant choisir ses Opposants, au besoin s’en fabriquer sur mesure.

Le Pouvoir ne tolère qu'une Opposition ...choisie

Ailleurs, c’est l’immigration ; chez nous, c’est l’opposition qui doit être choisie, sur mesure. Vingt cinq ans de parlotes n’ont donc pas réussi à donner le change : le régime en place se confirme inapte à la contradiction, fût-elle interne ou internationale. Le déroulement d’un récent congrès établit que le pouvoir n’a pas la possibilité de fonctionner autrement, l’unanimisme ayant supplanté toute velléité de compétition politique. On y est élu sans être candidat, sans concurrent et hors campagne. Le pouvoir désignatif persiste à supplanter le pouvoir électif.

Tout pouvoir qui ne supporte que soi en face de soi évite ainsi toute mise en compétition : il évince l’émulation par l’esprit de monopole. De ne pouvoir supporter que sa propre image finit par l’enfermer dans un narcissisme stérile où le record à battre ne s’évalue plus par rapport aux autres, mais par rapport à soi seul. Chacun de nous dispose du palmarès national et des multiples records que le pouvoir a battus dans de telles conditions. Le gouvernement ne travaillant plus qu’à choisir son opposition, dégage toujours des moyens substantiels pour tous ceux qui contribuent à étouffer la moindre velléité d’alternance politique. Ceux qui rêvaient de démocratiser le Cameroun savent désormais que la grande ambition de certains consiste plutôt à camerouniser la démocratie.

Mais personne ne devrait plus s’y tromper : les coups reçus par l’UPC depuis bientôt soixante ans n’ont pas réussi à la détruire. Pour ne l’avoir pas anéantie, ils l’ont au moins solidifiée dans les cœurs et l’inconscient collectif des populations du Cameroun. La braise rougeoie sous les cendres de la répression coloniale, néocoloniale, administrative ou militaire. Bien des martyrs nous font des clins d’œil au plus sombre de leur fosse commune. C’est qu’à l’UPC, nous savons mourir pour l’idéal qui nous aide à survivre. Il est par ailleurs notoire que l’UPC n’est pas un parti d’Opposition, mais le parti auquel les autres, tous les autres partis, s’opposent. Ceux qui poussent l’UPC au maquis pourraient donc bien réfléchir quand ils font des discours sur le dialogue citoyen et la paix sociale. Ils pourraient au préalable savoir s’ils sont déjà capables d’assumer, pour une fois, les conséquences perverses de leur perverse inconséquence ? Car aujourd’hui, pas plus qu’en 1955, ni les armes, ni les geôles ne représenteront ni le droit ni la justice, toutes valeurs républicaines que l’édit du MINATD, véritable oukase, a bafouées sans ménagement.

Dans une provocation d’Etat de cette gravité, il devient aventureux de se prévaloir de l’ordre public : tout pouvoir qui travaille contre l’ordre social se rend suspect de troubler l’ordre public. Or la politique aussi a une morale ; pour s’en être convaincu, Albert Camus (1944) estimait que le principe directeur de cette morale c’est la justice, celle-là même dont l’UPC en particulier, et les Camerounais en général, sont spoliés sous l’argutie de l’ordre public : pour Camus, « on ne peut invoquer la nécessité de l’ordre pour imposer des volontés. Car on prend ainsi le problème à l’envers. Il ne faut pas seulement exiger l’ordre pour bien gouverner, il faut bien gouverner pour réaliser le seul ordre qui ait du sens. Ce n’est pas l’ordre qui renforce la justice, c’est la justice qui donne sa certitude à l’ordre ».

Rendu à cette exigence, il y a avantage à faire la différence entre nous et les autres qui, dès qu’ils se retrouvent hors du gouvernement, menacent la république d’arracher les rails qui passent par leur village. Nous avions, nous, la faiblesse de croire que le droit balbutiant pouvait être consolidé, et que l’Etat de droit le serait en fait, pas seulement en droit. Le droit a pourtant été dit par nos tribunaux. Mais ce droit n’a manifestement pas été favorable aux intérêts politiciens du gouvernement ; alors le gouvernement l’a contredit. Quel choix une telle pratique laisse-t-elle à ceux qui rêvaient encore de justice mais qui se trouvent plutôt violemment spoliés de leurs simples droits de militants ?

Pourtant nul, ni rien, ne nous fera désespérer. Pas même ceux qui, aujourd’hui, prennent le risque d’organiser des syndicats de Ministres d’Etat : s’il se trouve encore au Cameroun un seul dirigeant à penser que le drapeau national signifie autre chose qu’un carnet de bons d’essence, alors nous invitons instamment le gouvernement à faire œuvre utile. Nous n’attendons pas que les fils du sérail cassent le moule qui les a si curieusement déformés : un papayer ne peut produire des mandarines. Mais la scène politique nationale a urgemment besoin d’être aseptisée, désinfectée. Economisons les morts de l’intolérance politique dont le nombre risque d’augmenter pour cause de malgouvernance.

Cette gageure peut être tenue par un effort d’œcuménisme politique.

Oecuménisme et non concubinage politique

Faire œuvre utile reviendrait pour le gouvernement à mettre en berne les fanions de l’imposture en cours, pour conduire à des congrès de réconciliation tous ceux qui se croient nés pour diriger les autres. Les partis politiques vont et viennent. Le propre des partis, comme leur nom l’indique, c’est d’être partis. Ces partis partiront, les Camerounais resteront. Le gouvernement a-t-il les moyens de se rendre compte qu’il devient inutile, et même une charge dès lors que pour des raisons politiciennes il ne garantit plus ni la pérennité de l’Etat ni la sécurité quotidienne des citoyens ? Que dire alors d’un gouvernement qui, pour son petit confort, incite des citoyens à se déchirer ? Est-ce par cette incitation à l’intolérance partisane que se définira désormais l’ambition du pouvoir en place ?

Cette question vaut mieux qu’une réponse qu’on n’attend plus depuis des décennies. Il faut cependant se donner une chance supplémentaire, malgré la pléthore des occasions manquées. Cette chance, c’est l’œcuménisme politique : qu’on ne demande plus à un musulman d’aller au Vatican y prendre l’eucharistie. Qu’on ne demande plus à un chrétien d’aller à la Mecque y psalmodier des sourates. Qu’on ne demande plus au catholique de sacrifier au rituel de la Sainte Cène des Protestants, et inversement. Mais une fois que la patrie est menacée d’implosion comme c’est sans doute déjà le cas, que chacun, à partir de sa chapelle, fasse monter vers le Ciel sa prière la plus fervente, son sacrifice le plus pensé, pour que le drapeau soit protégé et sauvé de ce que nous voudrions nommer la gouvernite, cette propension tropicale à gouverner hors gouvernance.

On pourrait alors mesurer le ridicule, en fait l’abjection pour un Upéciste de s’affubler d’écharpes et de casquettes contre nature, sous le seul prétexte qu’à la fin de la course, le bon cheval qu’il aura été pendant une campagne électorale recevra un morceau de sucre. Il y a toujours un peu d’avoine pour celui qui sait faire l’âne ; mais nul ne devrait se vendre pour un plat de lentilles : résister à sa faim est un atout de dignité qui fait respecter ceux qui, hier, ont su avoir faim sans pour autant crier famine, encore moins vendre leur âme.

La manœuvre du Ministre d’Etat chargé de l’Administration territoriale fait craindre la préparation de nouveaux états d’urgence. On veut même nous laisser croire que cette besogne a été instruite par le sommet de l’Etat d’où descendent toujours de « hautes instructions ». Rien ne nous permet de douter de la réalité de telles instructions, encore moins de leur hauteur. Mais en marge des états d’urgence en préparation, l’urgence de l’Etat - qui devrait être patriotique et non plus répressive, commande au moins deux options majeures :

a)- que le MINATD exhorte plutôt les divers anges politiques en conflit de leadership ou de légitimité à se retrouver dans un Congrès de Réconciliation pour désigner, ensemble, l’Archange qui doit les conduire au paradis qu’ils se représentent.

M. Koungou Edima Ferdinand - dont la riche expérience nourrissait le double souci de pondération et de paix sociale, avait su obtenir de l’UPC une liste consensuelle. L’étape suivante était un congrès consensuel d’où devait enfin sortir une direction unique et non contestée de cette formation politique. Cette étape a été sabotée par ceux qui ont eu peur de ne plus rien avoir à monnayer et qui, dévaluant l’UPC, tentent aujourd’hui de la réduire à une propriété individuelle, d’en faire leur propriété ! Mais qui donc a toujours eu peur des élections ouvertes et libres au sein de l’UPC ? Un congrès électif collégial demeure le passage recommandé pour économiser des déchirements, préserver des vies et la dignité du militantisme citoyen. Il faut, pour cela, que chacun renonce à s’attribuer des qualités et une popularité qu’il n’a pas. Que chacun se présente à des électeurs, au lieu de s’arroger des titres de direction dans l’objectif mal dissimulé d’entraver l’épanouissement et le déploiement de l’UPC. La dictature germe et prospère chaque fois que l’intérêt personnel d’un Général cherche à s’imposer comme intérêt général.

b)- que le gouvernement du Cameroun arrête de faire son marché dans le réfrigérateur de l’Opposition. Dans le cas de l’UPC, il vient de se faire prendre en flagrant délit d’imposture en faveur d’une faction manifestement plus intéressée par des positions de prébendes que par une vocation de service. Si ce n’est pas de la corruption politique, cette manœuvre lui ressemble étrangement.

Qui donc expliquera, et avec quels mots, qu’en matière de gouvernance, il s’agit de défendre et de protéger les intérêts du Cameroun, non de se défendre et de protéger ses intérêts contre les Camerounais ?

Eliminer l’UPC conséquente de la vie nationale en la poussant au maquis ? N’en tolérer, pour des raisons décoratives que la frange gastronomique ? Ce programme est bientôt sexagénaire. Mais plus de cinquante ans après, l’UPC conséquente reste un caillou dans la chaussure des antipatriotes. Il est incontestable que l’UPC survivra à ceux qui arborent ses couleurs pour mieux la gangrener de l’intérieur.

Car j’entends déjà les Upécistes ironiser en manière de riposte: « Qui leur a menti que nous étions finis ? » . Je les entends qui, minuit passé, chantonnent à l’intention du Grand Absent, encore plus présent et plus demandé aujourd’hui que la plupart de nos zombies politiques dont les silhouettes d’épouvantails brouillent de leur inconsistance existentielle la visibilité de l’horizon national :

« Tu mourus immortel !Ton martyre t’épure

Tes fils ont le front haut quand ils parlent de toi. »

Hon. Charly Gabriel Mbock

Député UPC

- Texte rédigé le 17-08-2006, paru dans Le Messager.


Des exemples concrets dans le Nyong-et-Kellé

By Cameroon Tribune
Aimée Francis AMOUGOU

Publié le 09 octobre 2006

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Des exemples concrets dans le Nyong-et-Kellé

Charly Gabriel Mbock, député UPC, initie de nombreux projets de développement dans sa circonscription électorale

Mettre à la dispositon des électeurs du Nyong-et-Kellé, sa circonscription électorale, des réalisations concrètes susceptibles de leur permettre de générer leurs propres ressources de développement. Tel est l'objectif poursuivi par le député de l'Union des populations du Cameroun (UPC), Charly Gabriel Mbock. Depuis juin 2002, il s'emploie à donner un contenu palpable à sa première législature. "Je me refuse l'étiquette de député-33", affirme-t-il, arguant que chaque bouteille de bière bue équivaut à une semence et demie, comparé au coût d'un plant de palmier à huile. Pour éviter ce type de "perte sèche", le député UPC du Nyong-et-Kellé révèle avoir initié, sur la base des ressources allouées pour les micro-projets parlementaires, à savoir huit millions de FCFA/an, plusieurs projets dans certaines localités de son département.

C'est avec un bonheur inégalé qu'il parle du projet dit "Ecopalm" mis sur pied dans plusieurs écoles secondaires du Nyong-et-Kellé. Il s'agit de pourvoir chaque établissement intéressée d'une palmeraie d'un hectare. "J'ai saisi le Ministère de la Recherche scientifique et de l'Innovation qui, à travers l'Institut de recherche agricole pour le développement, a facilité l'achat des semences ayant servi à la création des pépinières" révèle-t-il. Avec l'appui des techniciens d'agriculture, des personnels recrutés sur place ont rendu disponible la mise en terre de milliers de plants. L'on a encore en mémoire cette cérémonie officielle organisée à Makaï, le 4 juin 2004, pour la livraison de jeunes plants pour 55 ha attribués aux écoles ayant repondu favorablement au projet. A ce jour, sur une moyenne de 200 établissements scolaires sollicités, le député se réjouit d'avoir réalisé 83 ha de palmeraie. "La production pourra, pendant de longues années, être un appui réel aux besoins de l'établissement en terme de fonctionnement et d'agrandissement du campus", soutient le député.

Autre projet: le "Bobla-Facile". Il s'agit de doter les associations féminines du départements des moulins permettant de faciliter la transformations du manioc en bâtons, couscous et gari, entre autres, dont la commercialisation génère des revenus aux populations concernées. A ce jour, une dizaine de moulins à écraser a été offert. Le coût d'une machine est estimé à environ 300 000 FCFA. " L'argent des micro-projets ne devrait pas servir à l'achat de belles cravates, mais à l'apport d'un élu à l'amélioration des conditions de vie des populations", déclare Charly Gabriel Mbock. Le député UPC du Nyong-et-Kellé et, en outre, en train de mettre sur pied une structure d'élévage des hérissons. Le projet, placé sous la responsabilité de Bernadette Nlome, formée en technique de gestion, permettra de satisfaire les besoins en protéines et en la conservation de l'espèce. L'on peut également citer les multiples actions du député qui, en association avec son collègue Soundjock Soundjock, ont permis l'équipement, la viabilisation et à la réhabilitation des hôpitaux d'Eséka et de Bot-Makak, ainsi que du dispensaire de Ntouleng. Tout en remerciant les populations d'avoir adhéré au projet, Charly Gabriel Mbock réaffirme l'importance des micro-projets parlementaires. Si certains de ses collègues les jugent insignifiants, le député du Nyong-et-Kellé réagit en affirmant que ces ressources décaissées par l'Etat sont insuffisantes comparées aux nombreuses sollicitations auxquelles les élus du peuple font quotidiennement face.

Interview (novembre 2006)


Publié sur le web le 14 Novembre 2006

By Propos Recueillis Joseph Flavien Kankeu

Pendant la période d'intersession, une réunion extraordinaire des membres du bureau de l'Assemblée nationale a débouché sur la levée des immunités parlementaires de deux députés du parti au pouvoir. Comment avez-vous apprécié cette décision ?

Il est important de savoir que c'est notre bureau qui prend cette importante décision concernant l'immunité parlementaire de certains députés. Ce ne peut être de gaîté de coeur parce qu'une décision aussi lourde équivaut à une amputation pour tous ceux qui sont amenés à la prendre. L'Assemblée a donc dû s'amputer de quelques membres, ce d'autant plus que c'est une question de justice. Il faut retenir qu'il ne s'agit pas encore de condamnation. Il est question pour l'Assemblée nationale de permettre aux députés concernés de se présenter devant l'autorité judiciaire pour apporter des clarifications sur des points qui leur sont à tort ou à raison reprochés.

C'est ce que cela signifie. L'opinion est partagée. Certains pensent que ces députés ne devraient même plus se présenter à l'Assemblée nationale tant que le verdict n'est pas connu. Mais je voudrais dire dans la limite de ma propre compréhension que ces personnalités sont toujours des députés. Elles n'ont pas été déchues de cette qualité. Et à ce titre, sauf erreur de compréhension, ils peuvent valablement siéger puisqu'ils ne sont pas encore sous le coup d'une condamnation. Le bureau de l'Assemblée nationale leur a simplement permis de se présenter devant l'autorité judiciaire. Nous ne devons pas confondre nos souhaits avec la réalité du fonctionnement du droit.

Parlant des détournements des fonds publics justement, quelles sont vos attentes par rapport à l'opération d'assainissement en cours ?

Je souhaite tout d'abord qu'elle suive efficacement son cours. Qu'elle n'organise pas des zones de flou ou des zones d'ombre parce que c'est souvent dans ces dernières que les populations s'interrogent et affabulent. Je ne peux pas me prononcer à la place de nos tribunaux. Parce qu'une personnalité est interpellée sur des motifs bien connus et bien identifiés ou de toutes les manières qualifiés. A partir de la qualification du délit, il appartient à l'autorité judiciaire de dire quel type de sanction la loi prévoit. A partir de ces lois, il y en aura certainement qui seront privés de liberté. D'autres se verront probablement, en plus de la privation de liberté, condamnés à des dommages et intérêts. Mais je ne peux pas, en tant que parlementaire, sortir du législatif pour répondre à la place du judiciaire. Nous avons vocation à voter des lois.

Ce n'est pas nous qui les appliquons. Et le pouvoir judiciaire en connaît. Et à partir de ses propres compétences, il saura non seulement qualifier le délit, mais estimer le type de sanction dont ceux qui se sont rendus coupables seront frappés. Ce que je pourrais suggérer puisque je suis en contact direct avec les populations, c'est de leur dire que notre rôle de député s'arrête à la porte du pouvoir judiciaire. Nous avons voté des lois. Le juge a mission de les appliquer et de les faire respecter. Ils sont formés pour cela. Nous devons leur laisser la liberté de faire leur travail sans interférence. Les condamnations, s'il y en a, seront connues à date.

La session budgétaire s'ouvre ce mardi à l'Assemblée nationale. Pouvez-vous nous présenter les grandes orientations de la Loi de finances de l'année 2007 qui va être adoptée ?

Je suis au regret de dire qu'à la veille de la rentrée parlementaire, je n'ai pas encore reçu copie de ce projet de loi, contrairement à ce que les députés ont fortement recommandé et contrairement à ce que le gouvernement a promis. Le texte devait déjà être disponible. Je suppose qu'il est déjà sur la table du bureau de l'Assemblée nationale. Je n'ai pas compétence à mon niveau pour l'affirmer. N'empêche que le souci de l'opinion, c'est de s'assurer que l'atteinte du point d'achèvement a conduit à des retombées concrètes pour la gestion de leur vie quotidienne.

Il s'agit pour le citoyen camerounais d'améliorer son ordinaire. Parce que les Camerounais se sont imposés et se sont vus infliger des sacrifices pendant trop longtemps pour qu'on leur dise encore "attendez". Je suppose qu'il est difficile de dire à un malade agonisant d'attendre le médicament pendant une semaine. Ils veulent avoir des médicaments pour ceux qui sont malades, de la nourriture pour ceux qui ont faim et des fournitures scolaires pour ceux qui ont des enfants à l'école. Nous ne voulons plus de discours. Il faut prouver le mouvement par la marche. Les Camerounais veulent qu'on déplace les cailloux, mais qu'on ne leur dise plus qu'on va déplacer les cailloux. Je voudrais insister là-dessus. Lorsque nous avons un problème de nivaquine, on organise un séminaire sur la philosophie de la nivaquine.

Tout l'argent qui devait servir à acheter la nivaquine est dépensé dans des hôtels de luxe pour un séminaire sur la philosophie du paludisme ou de la nivaquine. Les Camerounais ne veulent plus des séminaires à perdiem et à pause-café. Je suis à la base et je connais les morts qu'on enterre chaque jour parce qu'il n'y a pas de comprimé de nivaquine. Faisons concret et arrêtons de bavarder sur la pauvreté des Camerounais.

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Question Orale à M. Le Ministre de l'Economie et des Finances

QUESTION ORALE A M. LE MINISTRE DE L’ECONOMIE ET DES FINANCES

(Vendredi, 24 Novembre 2006)

Excellence,

Le Vendredi 9 juin 2006, répondant à une Question orale sur des fraudes douanières liées aux importations illicites de lait au Cameroun, vous avez solennellement déclaré devant l’Assemblée nationale :

« Des actions énergiques ont été entreprises pour récupérer les droits de douanes compromis allant jusqu’au blocage des comptes bancaires de l’entreprise Nestlé. Les droits compromis ont été comptabilisés et acceptés d’accord parties et le payement de ces droits est actuellement en cours et devrait s’achever au plus tard à la fin du mois de juin. C’est cette voie que nous avons suivie, la voie de l’efficacité qui nous permet de récupérer nos droits ». (cf. Procès verbal de la séance plénière, p. 25)

Nous vous sommes reconnaissants de votre intention d’efficacité, car ces droits s’élèvent à près de deux milliards (1 925 734 736) de nos francs, et les Camerounais en ont plutôt grand besoin en ce moment. C’est pourquoi six (6) mois après votre engagement solennel devant l’Assemblée nationale, et afin de nous permettre de fermer ce dossier sensible, nous vous prions de bien vouloir certifier que ces droits ont été effectivement récupérés.

Votre certification nous soulagera d’une profonde inquiétude : les Députés sont en effet effrayés d’apprendre, sur document, qu’au lieu de récupérer les sommes dues, votre Excellence a plutôt diligenté des missions très spécifiques auprès de Nestlé Cameroun – pour gommer sa dette de fraude envers le Trésor public.

Vos collaborateurs auraient si bien travaillé qu’ils ont déclaré nuls et sans fondements cinq (5) Procès-verbaux antérieurs, dressés par leurs collègues Inspecteurs entre décembre 2001 et mai 2006, et un Rapport d’expertise judiciaire - documents qui ont conduit au verdict n° 650 du 16 sept 2004 que la Cour d’Appel a confirmé le 19 mai 2006.

Vos mandataires s’appuyaient sans doute de bonne foi sur la Loi des Finances n° 0098/009 du 1er juillet 1998, qui exonère certains produits incriminés de la TVA. Seulement, ces Inspecteurs, hauts fonctionnaires assermentés des Douanes et des Impôts, ont agi en violation flagrante du Code Douanier International que le Cameroun applique.

La Section 3 de ce Code porte dispositions communes aux procès-verbaux de saisie et aux procès-verbaux de constat. En son Article 313 nous lisons « Celui qui veut s’inscrire en faux contre un procès-verbal est tenu d’en faire déclaration par écrit (…) au plus tard à l’audience indiquée par la sommation de comparaître devant le tribunal qui doit connaître de l’infraction ».

Or dans le cas d’espèce, M. Le Président, au moment où M. le Ministre nous parlait ici en juin 2006, la Cour d’Appel avait déjà confirmé le verdict sur la fraude en mai 2006. Cela n’a pas empêché que le Ministre dépêche des missions de nettoyage auprès de Nestlé. Il nous revient d’ailleurs que l’hospitalité lactée et les conditions de travail « concentrées et sucrées » - que Nestlé a garanties aux mandataires de M. le Ministre ont renforcé l’efficacité de leur gomme.

C’est ainsi que dans leur Rapport daté du 29 septembre 2006, ils ont annulé la créance de Nestlé à…85,30%, passant de 1 925 734 736 à …seulement 283 374 167 FCFA !

J’ai voulu me consoler en pensant que Nestlé ayant néanmoins reconnu ses torts et déposé une caution de 400 millions dans les caisses de l’Etat, nous n’aurions à lui reverser qu’un trop perçu de 116 625 833 FCFA ! Hélas, il n’en est même pas question. Car votre nouveau Procès-verbal souligne que même ces 283 millions de TVA ne sont pas imputables à Nestlé. En anglais comme en français, cela veut dire que sur deux milliards, Nestlé n’a plus rien à payer au trésor public camerounais !

Mais dans le même temps, le Trésor public, nos impôts, devront payer des honoraires de 240 millions, pour les cabinets d’avocats mobilisés par M. le Ministre.

Excellence,

Vous savez qu’une enquête internationale de l’Office Européen de Lutte Antifraude (OLAF), organe de la Commission Européenne, a confirmé cette fraude. Si vous estimez que l’image du Cameroun mérite un meilleur éclat auprès de ce partenaire privilégié, et si vous pensez que l’Assemblée nationale du Cameroun mérite quelques égards, c’est le moment de nous dire la vérité. Car pour que les choses se passent ainsi, il faut qu’il se soit passé des choses…

Comment Nestlé a-t-il fait pour obtenir du Ministre de l’Economie et des Finances du Cameroun que malgré les conclusions d’experts et les verdicts des tribunaux, une créance pour fraude douanière de près de deux milliards soit effacée d’un claquement de doigt, alors que Nestlé, avait reconnu son délit et déposé une caution de 400 millions de francs dans les caisses de la douane suite au blocage de ses comptes ?

M. Le Président,

Le respect que je vous dois - à vous et à la Chambre entière, me commande de nuancer mes propos. Mais chacun conviendra que cette situation est renversante.

Car maintenant, Mesdames et Messieurs les Députés, ce n’est même plus Nestlé qui doit payer des dommages au Trésor public camerounais. C’est le Cameroun qui doit reverser à Nestlé une caution que notre Ministre veut déclarer indûment perçue ! Grâce à cette manière d’efficacité, Nestlé coupable de fraude douanière culpabilise le Trésor public, sa victime. Et comme par hasard, sur les six (6) sociétés épinglées dans cette immense fraude, seule Nestlé a bénéficié de tant de sollicitude.

M. le Ministre, La Chambre ne vous demande pas de lui révéler ce qui a…motivé cette curieuse entreprise de nettoyage, et la surprenante discrimination qui la caractérise.

Seulement, des deux choses l’une :

- Si vous nous assurez que c'est sur "hautes instructions du Chef de l'Etat" que vous offrez tant de lait à Nestlé qui en produit, je retire ma question...Mais je ferai noter sur nos PV à nous que personne ne devra, à l'avenir, reprocher à l'Assemblée Nationale d'avoir laissé tout un Ministre de l'Economie et des Finances se noyer dans une piscine de lait.

- Si en revanche, c'est par un syndrome de biberon personnel que vous vous acharnez à effacer en faveur de Nestlé deux milliards de fraude, contre l'intérêt d'un Pays Pauvre Très Endetté - qui aurait pu être considéré comme votre pays - alors un sevrage s'impose.

Mais Excellence, malgré ce qui ressemble à une indélicatesse vis-à-vis du Trésor public, l'Assemblée nationale serait disposée à vous faire une gentillesse: mettre en place une Commission ad hoc pour vous protéger contre toute personne qui vous empêchera désormais de faire valoir vos droits à la démission.

Je vous remercie Monsieur le Président.