Publié sur le web le 14 Novembre 2006
By Propos Recueillis Joseph Flavien Kankeu
Pendant la période d'intersession, une réunion extraordinaire des membres du bureau de l'Assemblée nationale a débouché sur la levée des immunités parlementaires de deux députés du parti au pouvoir. Comment avez-vous apprécié cette décision ?
Il est important de savoir que c'est notre bureau qui prend cette importante décision concernant l'immunité parlementaire de certains députés. Ce ne peut être de gaîté de coeur parce qu'une décision aussi lourde équivaut à une amputation pour tous ceux qui sont amenés à la prendre. L'Assemblée a donc dû s'amputer de quelques membres, ce d'autant plus que c'est une question de justice. Il faut retenir qu'il ne s'agit pas encore de condamnation. Il est question pour l'Assemblée nationale de permettre aux députés concernés de se présenter devant l'autorité judiciaire pour apporter des clarifications sur des points qui leur sont à tort ou à raison reprochés.
C'est ce que cela signifie. L'opinion est partagée. Certains pensent que ces députés ne devraient même plus se présenter à l'Assemblée nationale tant que le verdict n'est pas connu. Mais je voudrais dire dans la limite de ma propre compréhension que ces personnalités sont toujours des députés. Elles n'ont pas été déchues de cette qualité. Et à ce titre, sauf erreur de compréhension, ils peuvent valablement siéger puisqu'ils ne sont pas encore sous le coup d'une condamnation. Le bureau de l'Assemblée nationale leur a simplement permis de se présenter devant l'autorité judiciaire. Nous ne devons pas confondre nos souhaits avec la réalité du fonctionnement du droit.
Parlant des détournements des fonds publics justement, quelles sont vos attentes par rapport à l'opération d'assainissement en cours ?
Je souhaite tout d'abord qu'elle suive efficacement son cours. Qu'elle n'organise pas des zones de flou ou des zones d'ombre parce que c'est souvent dans ces dernières que les populations s'interrogent et affabulent. Je ne peux pas me prononcer à la place de nos tribunaux. Parce qu'une personnalité est interpellée sur des motifs bien connus et bien identifiés ou de toutes les manières qualifiés. A partir de la qualification du délit, il appartient à l'autorité judiciaire de dire quel type de sanction la loi prévoit. A partir de ces lois, il y en aura certainement qui seront privés de liberté. D'autres se verront probablement, en plus de la privation de liberté, condamnés à des dommages et intérêts. Mais je ne peux pas, en tant que parlementaire, sortir du législatif pour répondre à la place du judiciaire. Nous avons vocation à voter des lois.
Ce n'est pas nous qui les appliquons. Et le pouvoir judiciaire en connaît. Et à partir de ses propres compétences, il saura non seulement qualifier le délit, mais estimer le type de sanction dont ceux qui se sont rendus coupables seront frappés. Ce que je pourrais suggérer puisque je suis en contact direct avec les populations, c'est de leur dire que notre rôle de député s'arrête à la porte du pouvoir judiciaire. Nous avons voté des lois. Le juge a mission de les appliquer et de les faire respecter. Ils sont formés pour cela. Nous devons leur laisser la liberté de faire leur travail sans interférence. Les condamnations, s'il y en a, seront connues à date.
La session budgétaire s'ouvre ce mardi à l'Assemblée nationale. Pouvez-vous nous présenter les grandes orientations de la Loi de finances de l'année 2007 qui va être adoptée ?
Je suis au regret de dire qu'à la veille de la rentrée parlementaire, je n'ai pas encore reçu copie de ce projet de loi, contrairement à ce que les députés ont fortement recommandé et contrairement à ce que le gouvernement a promis. Le texte devait déjà être disponible. Je suppose qu'il est déjà sur la table du bureau de l'Assemblée nationale. Je n'ai pas compétence à mon niveau pour l'affirmer. N'empêche que le souci de l'opinion, c'est de s'assurer que l'atteinte du point d'achèvement a conduit à des retombées concrètes pour la gestion de leur vie quotidienne.
Il s'agit pour le citoyen camerounais d'améliorer son ordinaire. Parce que les Camerounais se sont imposés et se sont vus infliger des sacrifices pendant trop longtemps pour qu'on leur dise encore "attendez". Je suppose qu'il est difficile de dire à un malade agonisant d'attendre le médicament pendant une semaine. Ils veulent avoir des médicaments pour ceux qui sont malades, de la nourriture pour ceux qui ont faim et des fournitures scolaires pour ceux qui ont des enfants à l'école. Nous ne voulons plus de discours. Il faut prouver le mouvement par la marche. Les Camerounais veulent qu'on déplace les cailloux, mais qu'on ne leur dise plus qu'on va déplacer les cailloux. Je voudrais insister là-dessus. Lorsque nous avons un problème de nivaquine, on organise un séminaire sur la philosophie de la nivaquine.
Tout l'argent qui devait servir à acheter la nivaquine est dépensé dans des hôtels de luxe pour un séminaire sur la philosophie du paludisme ou de la nivaquine. Les Camerounais ne veulent plus des séminaires à perdiem et à pause-café. Je suis à la base et je connais les morts qu'on enterre chaque jour parce qu'il n'y a pas de comprimé de nivaquine. Faisons concret et arrêtons de bavarder sur la pauvreté des Camerounais.
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